La Garantie financière copropriété est-elle une TSVA : Taxe Sans Valeur Ajoutée ?

 

A l'entrée du bureau de votre syndic les affiches précisant la garantie financière qui lui est accordée impressionnent par la taille des chiffres et la hauteur du montant. Ce format évoque les annonces de gains placardées aux points de vente du loto. Les copropriétaires seraient-ils tous gagnants sans même jouer ? Pas si sûr !


Garantie financière : un objectif sécuritaire

La loi Hoguet impose au professionnel exerçant la fonction de syndic de copropriété de couvrir les fonds qui lui sont confiés en souscrivant une assurance Garantie financière auprès d'un organisme spécialisé.

Dans le cadre de la gestion courante, le syndic perçoit généralement des sommes correspondant à un trimestre de charges, déposés sur son compte unique si le syndicat a accepté la dérogation d'ouverture du compte bancaire séparé prévu par la loi de 1965.

Il est alors normal que le syndic apporte à son client, le syndicat, la garantie que ses fonds ne seront pas perdus, même en cas de défaillance ou de malversation.


La relativité des coûts

Sans rentrer dans une étude concurrentielle, le coût annuel annoncé pour la garantie financière est de l'ordre de 0,5% du montant de la pointe de trésorerie détenue par le syndic. Ramené au copropriétaire qui avance un trimestre de charge, par exemple 500 €, le coût de sa garantie financière est de l'ordre de 2,5 € par an. Voilà une charge indolore qui est de fait incluse dans le forfait de gestion courante inscrit dans le contrat du syndic. Les flux financiers drainés sont autrement conséquents si l'on se réfère aux dizaines de millions de copropriétaires.

Quels risques courir, quels risques couvrir ?


Comme il est cité ci-dessus, la détention des fonds par le syndic expose à deux natures de risques : la défaillance et la malversation. Dans la mesure où les fonds sont déposés sur un compte séparé comme le prévoit la loi, le risque de défaillance est reporté sur le banquier. Peut-on courir le risque d'une défaillance du banquier ? Dans le système bancaire français actuel, j'ai tendance à être affirmatif.

 

Il reste donc à se protéger de la malversation, objet de la responsabilité civile particulière du mandataire. Je serai étonné que le taux de prime appliqué puisse se justifier par une sinistralité exceptionnelle des malversations de cette honorable profession.

 

En résumé le taux de prime devrait être différencié selon le mode de placement des fonds, ce qui éviterait des frais inutiles à nos partenaires syndics professionnels. D'ailleurs les syndics bénévoles qui utilisent naturellement un compte bancaire séparé ne sont pas astreints à la garantie financière car le taux de risque résiduel est très faible.

 

Par ailleurs la garantie financière ne couvre pas tous les risques du syndicat puisque la copropriété ignore si le syndic défaillant ou malveillant a eu le temps de payer sa prime avant d'être insolvable. Dans ce cas le syndicat apprend son infortune trop tard. L'assurance n'est sûre qu'avant l'accident !

La taxe travaux

L'approche des travaux, et notamment les travaux de rénovation énergétique avec des budgets dont l'ampleur peut atteindre 10 fois le budget annuel, va bousculer les flux financiers de la copropriété et ceux du syndic.

 

Pour ces montants, les versements directs sont rares. Les trois sources classiques de financement des travaux lourds sont la création de fonds travaux (financement amont), l'obtention de subventions et l'emprunt (financement aval).

 

Pour reprendre l'allusion initiale, si au loto le joueur à deux chances de gagner (au grattage puis au tirage), la garantie financière fait mieux, le copropriétaire a lui trois chances de perdre. En effet, tous les apports entraînent une augmentation subite de l'encours de trésorerie et par voie de conséquence un surcoût de la garantie financière que le syndic devra souscrire, en majorant son plafond de couverture pour une durée minimale de 2 ans.

 

Ainsi un syndic, au titre de la transparence, n'a pas hésité à proposer, en sus de ses honoraires de gestion de travaux et d'emprunt, une prise en charge directe de 33 000 € HT pour le surcoût de garantie financière pendant 2 ans, de l'emprunt collectif associé à un budget travaux, estimé à 3,3 M€, géré sur compte séparé. Avec la TVA sur cette TSVA (Taxe Sans Valeur Ajoutée), c'est une pénalité de 40 000 € qui serait infligée aux copropriétaires. Les copropriétaires ont voté les travaux mais pas la taxe. Ils cherchent une solution de contournement ou de compromis avant leur prochaine AG.

L'amateurisme mieux que le professionnalisme

Alors que la copropriété a vraiment besoin de professionnels pour maîtriser sa gestion, surtout à l'approche des travaux, l'image de la profession de syndic est ternie par des obligations légales couteuses, sans rapport avec les besoins réels. Un réquisitoire de plus contre les lois qui la régissent.

 

Il est aujourd'hui paradoxal de constater qu'une copropriété gérée par un syndic bénévole, avec un compte bancaire séparé, des fonds travaux placés et une comptabilité réellement indépendante a toute chance d'avoir une gestion plus performante, plus transparente et plus facile à contrôler que celle tenue par un syndic professionnel.

Conclusion : Réformer les lois régissant la copropriété

Le montage juridique hybride fondement de la loi de 1965 qui définit la structure et la gouvernance des copropriétés vieillit aussi mal que les ensembles immobiliers qu'il est censé entretenir. Après les difficultés de l'application du Grenelle aux copropriétés, les mécanismes de garantie financière Hoguet exposés ci-dessus viennent encore assombrir les relations entre copropriétaires et syndics. De plus cette TSVA décourage l'épargne collective, privée de rendement, alors que les fonds travaux sont unanimement recommandés pour anticiper l'usure des bâtiments et équipements. Les multiples tentatives d'articles et amendements divers pour compenser les défauts structurels de la loi apportent plus de confusion que de réels remèdes et présentent de nombreuses incohérences pratiques. Inutile donc de faire de l'acharnement thérapeutique, la loi de 1965 et ses corollaires ont prouvé leur inefficacité pour organiser l'approche collective de l'entretien des immeubles et concourent à la défiance entre syndics et copropriétaires. Il faut simplifier, rationaliser, moderniser, responsabiliser. Ce constat est aujourd'hui largement partagé. Arrêtons au plus tôt le massacre de nos immeubles. Favoriser l'accès à la co-propriété c'est bien. Organiser les moyens de l'entretenir c'est mieux !